Saviez-vous que la plupart des villes demandent aux développeurs de construire un certain nombre de cases de stationnement pour chaque nouvelle construction ? On appelle « exigences minimales de stationnement » ce genre de règlement. C’est arrivé au début des années 50, en Amérique du Nord et en Europe, avec le développement des banlieues et le boom automobile. Mais depuis 20 ans, de plus en plus de villes décident de repenser, et même d’éliminer complètement ces exigences. Voyons pourquoi.
Les projets résidentiels, commerciaux et industriels doivent construire un certain nombre de cases de stationnement selon différents critères. Pour le résidentiel, c’est le nombre de logements (ex : une case par logement), et pour les commerces et industries, c’est la superficie (ex : 1 case pour 30 m²). Les chercheurs en planification urbaine critiquent depuis longtemps ces exigences parce qu’elles ont très souvent créé un surplus de stationnement. Elles influencent grandement le développement urbain, le transport et la forme des villes. Dans la mesure où les populations urbaines demandent plus d’espaces de vie, il est temps de repenser ces pratiques.
Un autre problème causé par ces exigences est qu’elles augmentent les coûts de construction. Intégrés aux frais de construction, ces coûts se répercutent dans la valeur du loyer ou du prix d’achat d’un immeuble. Le stationnement « gratuit », on le paye indirectement dans le prix des produits et services. Dans un centre-ville, où le terrain disponible est limité, les exigences de stationnement favorisent la construction de grands immeubles qui permettent de rentabiliser les coûts supplémentaires. Pourtant, au centre-ville, le transport en commun, la marche et le vélo sont des options tout à fait viables. C’est pourquoi la Ville d’Ottawa a revu ses exigences de stationnement en 2016 pour prendre en compte la densité du secteur et l’accessibilité du transport en commun.
Pour vous donner une idée de l’effet de ces exigences de stationnement, imaginez la rue St-Denis à Montréal, ou encore Bank dans le Glebe à Ottawa, avec 6-7 cases de stationnement entre chaque commerce. Croyez-vous que les gens y marcheraient pour le plaisir ? Le rapport du service d’urbanisme de la Ville d’Ottawa donne 2 photos, reprises ici, qui montrent clairement comment les exigences minimales de stationnement influencent l’allure de la ville :
À Gatineau, les exigences minimales de stationnement sont les mêmes dans toute la ville, peu importe qu’on soit dans un cœur urbain, en banlieue ou en campagne. Ceci limite le développement des terrains vacants au centre-ville. À titre comparatif, les immeubles commerciaux des secteurs urbains de Montréal doivent fournir de 0 à 1 case de stationnement par 200 m², et ceux d’Ottawa de 0 à 3. À Gatineau, un commerce de 200 m² doit fournir 7 cases de stationnement.
Si une personne possède un petit lot comme celui de la boulangerie Estoril, au 89 Eddy (photo ci-bas), elle ne pourra pas construire une bâtisse de la même taille parce qu’elle devra fournir 7 places de stationnement à ses clients. Respecter les exigences minimales de stationnement l’obligerait à construire une bâtisse beaucoup plus petite, ou à construire un stationnement sous-terrain.
Pour aller plus loin sur le sujet, nous vous recommandons la lecture du rapport du service d’urbanisme de la Ville d’Ottawa : Règlement de zonage : Révision des exigences minimales en matière de stationnement.
Sources
Ville de Gatineau – Règlement de zonage No 502-2005
Ville d’Ottawa – Règlement de zonage : Révision des exigences minimales en matière de stationnement
Ville d’Ottawa – Révision du Règlement de zonage : exigences de stationnement minimales
Ville d’Ottawa – Révision des normes minimales de stationnement : Documents supplémentaires Examen des pratiques exemplaires (Montréal et Toronto)
Forinash, Millard-Ball, Dougherty & Tumlin (2003) Smart Growth Alternatives to Minimum Parking Requirements